Crise sanitaire Covid-19 : quelles sont les mesures prises par l’UE?
En raison de l’expansion rapide du nouveau coronavirus (Covid-19) dans le monde, l’Union européenne a pris une série de mesures dans le but d’atténuer les conséquences de cette crise sanitaire non seulement au sein des États membres (I), mais aussi dans certains États tiers1Un État tiers constitue un État qui ne fait pas partie de l’Union européenne. (II).
I. Les mesures prises au sein de l’Union européenne
Les mesures adoptées par l’Union européenne, applicables dans les États membres, peuvent être reparties dans plusieurs sections, à savoir des mesures sanitaires (A), des mesures économiques (B), des mesures concernant la promotion de la recherche (C), et autres (D).2Source : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/FS_20_552.
A. Les mesures sanitaires
- Examen en cours des possibilités de conversion des lignes de production, dans le but de fournir des équipements de protection individuelle dans les hôpitaux.3À titre informatif, de grands groupes comme la maison Prada, ainsi que le groupe Giorgio Armani, s’engagent dans la lutte contre le Covid-19. Ils vont dédier leurs usines de production à la fabrication de combinaisons médicales à usage unique pour le personnel médical.
- Examen en cours des stocks disponibles d’équipements de protection individuelle dans les États membres.
- Une réserve de matériel médical, notamment respirateurs et masques, sera mis à la disposition de certains États membres dans le cadre du mécanisme de protection civile, RescEU.4Pour plus d’informations sur ce mécanisme : https://ec.europa.eu/echo/what/civil-protection/resceu_en.
B. Les mesures économiques
- La Banque européenne d’investissement va créer un fonds supplémentaire de 20 milliards d’euros d’investissement dans les petites et moyennes entreprises. La Commission européenne va mobiliser 8 milliards d’euros pour venir en aide à au moins 100 000 petites et moyennes entreprises (PME).
- Initiative d’investissement à hauteur de 37 milliards d’euros dans le but d’avancer certaines dépenses et de les rediriger vers la lutte contre le nouveau coronavirus (Covid-19).
- La Commission européenne a adopté des règles temporaires en matière d’aides d’État afin que les États membres puissent injecter des liquidités dans l’économie pour soutenir les entreprises, les citoyens et préserver l’emploi.5Communication from the Commission, 19.3.2020, Temporary Framework for State aid measures to support the economy in the current COVID-19 outbreak, C(2020) 1863 final.
- La Banque centrale européenne va lancer un plan de rachat d’urgence de 750 milliards d’euros pour soutenir les États membres et leurs entreprises.6Source : https://www.ecb.europa.eu/press/pr/date/2020/html/ecb.pr200318_1~3949d6f266.en.html.
C. Les mesures portant sur la recherche
- La Commission a mobilisé jusqu’à 140 millions d’euros pour mettre au point des vaccins, de nouveaux traitements, des tests de dépistage et des systèmes médicaux dans le but d’empêcher la propagation du nouveau coronavirus (Covid-19).
- Dix-sept projets associant 136 équipes de recherche ont été sélectionnés pour bénéficier d’une enveloppe de 47,5 millions d’euros au titre du programme de l’Union européenne pour le financement de la recherche et de l’innovation « Horizon 2020 ».
- La Commission a proposé à CureVac, société européenne qui développe des vaccins, de lui fournir une aide jusqu’à concurrence de 80 millions d’euros sous la forme d’une garantie de l’Union européenne couvrant un prêt de la Banque européenne d’investissement. La société a l’intention de lancer les essais cliniques d’un vaccin d’ici à juin 2020.
D. Autres mesures
- Restriction temporaire de déplacement qui s’applique à tous les déplacements non essentiels en provenance de pays tiers et à destination de la zone UE pendant 30 jours, soit jusqu’au 15 avril.7Source : Communication de la Commission du 16 mars 2020, COVID-19: restriction temporaire des déplacements non essentiels vers l’UE, COM(2020) 115 final.
- Lutter contre la désinformation : actuellement, plus de 110 informations mensongères sur le nouveau coronavirus ont été dénoncées, publiées et rectifiées sur le site www.EUvsDisinfo.eu.8Source : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/FS_20_552.
En plus des mesures prises au sein de l’Union européenne, cette dernière a adopté des mesures applicables dans certains États tiers.
II. Les mesures prises à l’égard des États tiers
La Commission européenne va accorder des aides d’une valeur de 140 millions d’euros afin de répondre aux besoins immédiats de 6 États tiers : la République de Moldavie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Géorgie, et l’Ukraine (A). De plus, elle va accorder plus de 700 millions d’euros dans le but d’atténuer les conséquences socio-économiques de la crise sanitaire (B).
A. Aides pour répondre aux besoins immédiats9Source : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/ip_20_562.
1. Fourniture de dispositifs, équipements médicaux et formation du personnel
En corrélation avec l’Organisation mondiale du commerce, la Commission européenne déploie 30 millions d’euros pour l’achat de dispositifs médicaux et d’équipements personnels, tels que ventilateurs, kits de laboratoire, masques, lunettes, blouses et combinaisons de sécurité. Une partie de l’argent sera investie dans l’entraînement du personnel médical et de laboratoire dans le but de mener des actions de sensibilisation auprès de l’ensemble de la population.
2. Soutien des organisations de la société civile
La Commission européenne met plus de 11.3 millions d’euros à la disposition des groupes les plus vulnérables de la société, ainsi que des petites organisations locales. Elle souhaite répondre à des besoins immédiats, tels que le soutien des écoles locales dans l’enseignement à distance. D’ici l’été, la Commission lancera le « Programme de Solidarité du Partenariat Oriental » (Eastern Partnership Solidarity Program) qui ciblera les parties les plus touchées par la crise sanitaire.
B. Aides pour atténuer l’impact socio-économique de la crise sanitaire10Source : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/ip_20_562.
1. Soutien des petites et moyennes entreprises (PME) : l’accès facilité au crédit
L’Union européenne prévoit le lancement d’un nouveau programme de soutien de 100 millions d’euros pour aider les PME (petites et moyennes entreprises), y compris les indépendants et autres, à accéder facilement au crédit et à dynamiser leurs activités après la crise.
2. Soutien des petites et moyennes entreprises (PME) : attribution de subventions
200 millions d’euros des lignes de crédit existantes et des subventions seront accordés aux petites et moyennes entreprises (PME) par le biais de EU4Business Initiative.11L’initiative EU4Business de l’Union européenne est une initiative-cadre qui couvre toutes les activités de l’Union européenne en faveur des petites et moyennes entreprises (PME) dans les pays du partenariat oriental.
3. Assistance dans les plans de reaction aux situations d’urgence :
La Commission est également prête à fournir une assistance par le biais de son instrument TAIEX, en utilisant l’expertise, l’expérience et les exemples de bonnes pratiques des États membres de l’Union européenne en matière d’évaluation des plans de réaction aux situations d’urgence et des systèmes de santé.
4. Fourniture rapide des liquidités dans les pays voisins de l’UE :
Grâce au Fonds européen pour le développement durable (FEDD), l’Union européenne met à la disposition de six États voisins précités 500 millions d’euros. Cela fournira rapidement des liquidités dans le voisinage de l’Union européenne, notamment grâce au fonds de roulement, au financement du commerce ou à des moratoires sur le service de la dette.
Après avoir mis en relief les mesures les plus importantes prises par l’Union européenne dans le contexte de l’actuelle crise sanitaire, nous pouvons constater que sa contribution se concentre en grande partie sur un critère financier. Bien qu’elle poursuive, dès sa création, un objectif économique, l’Union européenne a prouvé, dans les dernières années, l’existence d’un élargissement de son intervention dans des domaines tels que le droit social, la citoyenneté européenne, l’environnement, l’agriculture et la pêche, la fiscalité, l’énergie, la santé publique, les télécommunications et autres.
Malgré le fait qu’elle ne cesse pas de réitérer sa suprématie sur les ordres juridiques nationaux, nous avons devant nous l’image d’une union impuissante face à la souveraineté des États membres. Avec la mise en place des restrictions terrestres, ainsi qu’aériennes12Voir par exemple, le cas de la Roumanie ou encore celui de l’Allemagne., les États membres réaffirment leur identité constitutionnelle, en prenant des décisions a priori contraires à la libre circulation des personnes, mais justifiées par la santé publique, raison impérieuse d’intérêt général.
En même temps, l’Union européenne ne dispose pas d’armée supranationale qui pourrait être envoyée dans les États membres souffrant considérablement à cause de l’expansion du nouveau coronavirus (Covid-19), comme l’Italie, l’Espagne, ou encore la France.
À mon avis, là où l’Union pourrait intervenir plus c’est dans le cadre de la préservation de la paix, de la négociation avec les États membres ou encore avec certains États tiers voisins, de rapatrier les citoyens en difficulté, éviter une fragilisation latente des principes européens, faire preuve de plus de solidarité et surtout de rapidité. La rapidité concerne essentiellement le fait de négocier avec certaines entreprises pouvant exporter des équipements médicaux. À présent, comme le soulignent plusieurs médias, mais aussi le personnel médical par le biais de témoignages, beaucoup d’hôpitaux français manquent d’équipements médicaux personnels. Et tel n’est pas le cas uniquement de la France.
Cette crise sanitaire constitue également une leçon de valorisation inhérente non seulement du principe de précaution,13Communication de la Commission sur le recours au principe de précaution du 2 février 2000, COM(2000) 1 final. mais aussi du principe d’action préventive, prévus aux dispositions de l’article 191 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, afin de prendre des mesures préventives de gestion d’éventuelles crises sanitaires.
S’il est tard aujourd’hui d’agir dans certains cas, l’Union européenne a encore le temps de définir des cadres législatifs d’intervention en situation de future crise sanitaire. Elle pourrait créer des fichiers à l’échelle européenne, afin de contrôler les entrées et les sorties aux frontières (en temps de crise uniquement ! sinon elle serait dépourvue de son essence-même), mettre à disposition des hôpitaux européens des équipements médicaux nécessaires avant qu’une éventuelle crise survienne, inciter les États membres à coopérer dans un cadre légal et autres mesures.
Et selon vous, quelles seraient les mesures que l’Union européenne devrait rajouter à sa liste afin de faire face à une situation de crise sanitaire ? Écrivez-les dans les commentaires.
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